Bruno

Bruno, solide gaillard devant l'entrée, il est scotché. Tel un phénix, de ses yeux rieurs, accrocheurs, il vous fixe, ne vous quitte pas du regard. Ce matin encore, il s'est levé tôt, avec un footing en ligne de mire. Quitter son îlot, amoindrir son lot, histoire de se dégourdir, s'enfléchir, les neurones plutôt que les guibolles. Partir s'oxygéner, se ressourcer, s'évader et foncer loin, bien loin par les vallées, sans glorioles, auréoles et encore moins boussoles. Les pattes bien serrées et calées, sans faire un bouclier, un allié. Se transformer et toujours la tête relevée. Tel un bolide, filé, on ne peut plus léger. La tête perchée dans les étoiles, cela fait si longtemps qu'il a mis les voiles. L'avancée de l'âge dans le rétro, revenir au petit trop, sans galop, avec courage, sans une once de rage. Après avoir sillonné ses bons paysages, puisque tout n'est affaire que de volonté, se remémorer tout ce qu'il a oublié et gommer sa vie passée à se dépasser, bosser, trimer, ce qui ne l'a pas empêché de déguster la déveine collée à ses pieds. Bientôt à la télé, les Jeux paralympiques, paraplégiques. Quelle leçon d'humilité. Viser toujours plus haut, inutile, il a déjà ce qu'il lui faut. Et puis son bicep se roder, à s'activer et se démunir, ne craignant plus le froid, ni les aléas de la vie. Dans ses baskets bien droits, toujours prêt à rire aux éclats. De quoi ? Son état pardi, plus de vue dans les reins, pas anodin son destin. Dans sa chaise électrique, coincée, condamnée à suivre ce chemin, à l'horizon, pas de médaille d'or, pourtant, il partage le même sort que ses athlètes handicapés.