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Amitié entre Jean Dutourd et Louis Aragon Voyage en URSS
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Amitié entre Jean Dutourd et Louis Aragon Voyage en URSS
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Amitié entre Jean Dutourd et Louis Aragon Voyage en URSS
The transcription is a conversation between Jean Ferré and Jean Dutour about a book called "Les Voyageurs du Tupolev" written by Jean Dutour. The book is about his adventure traveling with Louis Aragon and Elsa Triolet in 1957 in the Soviet Union. Jean Dutour shares his experiences and friendship with Aragon, who was a communist and a well-known poet. The conversation also touches on other topics such as Jean Dutour's relationship with Camille, his wife, and their interactions with the sculptor Belmondo. Overall, the conversation highlights Jean Dutour's perspective on his past experiences and his thoughts on the abundance of new books being published. Ici Radio Courtoisie, la radio libre du pays réel et de la francophonie. Dans le cadre des archives de Radio Courtoisie, voici le libre-journal de Jean Ferré, daté du 25 août 2003. Le revoilà, au bout du fil, si tout va bien, je vends du tour de l'Académie Française. Oui, oui, bonjour, comment ça va ? Très bien. Très bien, vous m'entendez bien. Ah, merveilleusement bien. Et si vous saviez, comme nous sommes heureux de vous retrouver... Je suis heureux aussi, je suis content d'être parmi vous. Chaque lundi, il y a des messages d'auditeurs, chaque lundi, avant que vous n'arriviez, disant j'espère bien que Jean Dutour sera là. Ah ben, c'est très gentil. J'espère que je ne vais pas les décevoir. Eh bien, il est là. Alors, cher Jean Dutour, première chose dont je voulais vous parler, j'ai reçu un petit livre extraordinaire. Je dis petit livre, parce qu'il ne fait que 120 pages, donc on peut le lire rapidement. Ah, je vous entends, comme dit le livre, je me réveille. Et le titre de ce livre, c'est Les Voyageurs du Tupolev. Oui, c'est un beau titre. L'éditeur est Plon et l'auteur est Jean Dutour de l'Académie Française. Vous connaissez ? Un peu, oui. Et il s'agit du petit roman d'aventure amicale entre le jeune Jean Dutour et deux illustres personnages beaucoup plus âgés que lui, c'est-à-dire Louis Aragon et Elsa Triolet. Et Jean Dutour était à ce moment-là chez Gallimard. Oui, oui, j'étais rond de cuir. Enfin, j'avais un titre très ronflant qui était conseiller littéraire, mais on ne me demandait aucun conseil. D'ailleurs, je ne m'occupais pas beaucoup de littérature. Je résume en gros et je vais vous poser d'autres questions. Oui. Et comme rond de cuir chez Gallimard, il fréquentait tous les grands auteurs, dont Louis Aragon et sa femme Elsa Triolet. Et un jour, Louis Aragon et Elsa Triolet lui ont proposé de l'emmener lors d'un voyage en URSS. C'était en 1957. Oui, oui. Et à l'époque, Aragon était membre du parti communiste. Aragon et sa femme Elsa Triolet étaient des propagandistes du communisme. C'était plus que ça. C'était de grandes figures du communisme et de la littérature. Voilà. Et le jeune Jean Dutour s'est trouvé avec eux dans un Tupolev et reçut en Russie comme un souverain, comme un jeune prince. Et vous racontez ces quinze jours en Russie et puis vous racontez la suite et puis après que vous avez pris vos discussions. Je raconte quinze ans d'amitié avec Elsa et Aragon. Ça a commencé bien avant, d'ailleurs, que je ne sois rencontré chez Gallimard. J'avais rencontré Elsa en 1946 ou 1947 au bord du pont Royal. Elle m'avait fait un effet extraordinaire et je l'avais rencontré avec le cœur battant parce que pour moi, c'était l'incarnation de la patrie. Les recueils d'Aragon, en particulier les yeux d'Elsa, c'était vraiment des choses nous attendions absolument comme des parachutages. Enfin, j'étais très ému de la voir et là-dessus, j'ai connu Aragon. Et puis, il y a eu une amitié qui a duré quinze ans et qui s'est brisée comme souvent les amitiés se brisent, c'est-à-dire sur des malentendus et des maladresses. À mon avis, il est tout à votre honneur qu'elle se soit brisée. Vous savez, nous nous prenions comme nous étions. Il savait parfaitement que je n'étais pas communiste et moi, je savais parfaitement qu'il l'était et puis voilà. Je vais vous dire que pour vous, Aragon est un grand poète et pour tout le monde, il est un grand poète. Moi, je ne supporte pas Aragon. Sa poésie, je ne la supporte pas. Elle a des choses très belles pourtant. Pour moi, c'était un propagandiste communiste et un profiteur du communisme. Donc, un personnage, je suis un anticommuniste primaire. Donc, un personnage que du haut de mon primarisme communiste, je déteste. Et vous avez réussi cette prouesse, c'est de m'intéresser à vos relations avec Aragon et de m'intéresser à un voyage d'Aragon en Russie. C'est la merveille de l'écrivain. C'est la merveille du grand écrivain. Car vraiment, on m'aurait dit qu'un jour, je lirais avec bonheur 120 pages autour d'Aragon, j'aurais éclaté de rire. Eh bien, non seulement, j'ai lu les 120 pages autour d'Aragon, mais je vais vous dire, je vais vous faire une confidence, je vais les relire. Ah bien, formidable. Merci. Et ça, c'est la merveille du grand écrivain. Merci, mais je ne sais plus quoi vous dire là. Dominique Paoli, vous voulez intervenir ? Ah oui, moi je voulais dire que vraiment, je crois difficile qu'on puisse vous faire un plus grand compliment. Mais non, c'est formidable. Je suis quoi ? Je ne dis rien. C'est...venant de Jean, dire ça, c'est extraordinaire. Alors, une question peut-être indiscrète. Pourquoi, maintenant, avez-vous écrit ce petit livre sur vos relations avec Aragon ? C'est bon, comme ça. Parce que j'avais envie d'écrire quelque chose. Parce que j'ai pensé à Aragon, je me suis dit, tiens, c'est amusant mon voyage en URSS. Je n'ai rien oublié. Notre amitié, Camille et moi avec les Aragon, je n'ai rien oublié non plus. Eh bien, ça peut peut-être donner un petit livre amusant, et puis je l'ai écrit. Voilà. Quel âge aviez-vous en 57 ? J'avais, attendez, en 57, j'avais 37 ans. 37 ans. Alors, vous racontez qu'arrivant là-bas avec Aragon, on vous a donné un chef de cabinet. En fait, c'était, oui, une espèce de secrétaire interprète, qui était d'ailleurs très sympa et très gentille, qui s'appelait Vladimir Lénine, de son prénom, ce qui était, par abréviation, l'année Vladeleine. Et ce Vladeleine m'a fornaqué dans tout un tas d'endroits. Et en particulier, nous sommes allés voir Lénine et Staline, qui étaient encore dans le mausolée de la Place Rouge, et qu'on voyait derrière des vitres, embaumés tous les deux. Et alors, je les ai beaucoup admirés. Staline était un beau, avec des petites mains crochues. Ils étaient tous les deux enveloppés dans des drapeaux de métal, qui leur montaient jusqu'à la ceinture. Et les petites mains crochues de Staline avaient l'air de vouloir retenir encore le pouvoir et la vie. C'était absolument étonnant. Quant à Lénine, il était très vilain. Autant l'autre était beau, autant Lénine était vilain. Et il avait surtout une barbe de 8 jours. Alors, j'ai dit à Vladeleine, quand même, qu'ils auraient pu le raser. Alors, il a pouffé de rire, parce qu'il était assez frondeur et assez indépendant. Il a bouffé de rire et il a dit que les embaumeurs avaient raté le défunt. On a été obligé de recommencer et on l'a gardé 8 jours pour arriver à l'embaumer d'une façon satisfaisante. Et pendant les 8 jours, la barbe avait poussé naturellement. Ah oui, il faut lire ce livre. Il faut lire ce livre, et en ce qui me concerne, je vais donc le relire. Et nous en reparlerons. Je vais finir par vous convertir au communiste. Non, justement, c'est ça qui est intéressant. Il n'y a plus de communisme, c'est fini maintenant, c'est du passé. Oui, mais je suis anticommuniste primaire en toutes circonstances. Et ne comptez pas sur moi pour changer d'opinion maintenant. Simplement, pensez aux pauvres défunts. Je parle du parti communiste. Bon, les pauvres, vous allez me faire une peine terrible. J'ai aussi rencontré Thorez. Je parle de ma rencontre avec Thorez, qui avait l'air d'une ruine romaine toute rouge. Il était formidable. Enfin, je ne sais pas, je crois que c'est un petit livre qui peut intéresser les gens. En tout cas, c'est un point de vue sur Aragon qui n'est pas celui de tout le monde, je crois. Et puis, c'est un format agréable qu'il y a dans le sac à main ou dans le sac à dos de vacances. Le sac à dos que l'on retrouve dans les autobus et qui vous empêche d'avancer jusqu'à la porte. Je voulais aussi vous dire que, vendredi, dans l'émission « Les histoires de l'art » de Marie-Thérésa Blot, il y avait eu le grand critique d'art Guy Vigneault, qui a parlé de Belmondo. Ah, grand homme Belmondo. Le sculpteur Belmondo, le père du comédien. Mais j'aime beaucoup le comédien aussi. D'ailleurs, il est très gentil, Jean-Paul. Il dit, le grand homme dans la famille, c'est mon père, c'est pas moi. Et il nous a dit que Belmondo travaillait à une sculpture de votre épouse que nous pleurons tous, Camille. Oui, il y a eu beaucoup de séances de pause. Il avait fait le bus de ma femme. Et malheureusement, il est mort avant qu'il ne soit terminé. Et il y a eu, je ne sais quel cafouillage dans la succession. On a laissé un certain nombre de travaux qui étaient en graise séchée. C'est vrai que quand une graise sèche, il est fichu. C'est ce qui s'est passé. C'est très dommage. Et on avait eu des, nous avions eu des séances de pause merveilleuses. Il y avait, entre autres, il y avait deux ateliers. Un dans les jardins de l'Observatoire, qui était charmant. Et il y avait un autre qui était plus imposant, qui était l'ancien atelier de Gouraud à l'Institut, du baron Gouraud. C'était lui qui était là-dedans. Il vous reste quand même une médaille de Camille, faite par Belmondo. Il avait fait deux médaillons, un de moi, un d'elle. Ah, on pourrait les voir un jour, tous les deux. Oui, bien sûr. Ah, oui, oui. Le médaillon de moi, il a été tirant, on en a fait une médaille à la monnaie, si ça vous intéresse. Ah, et on la trouve toujours ? Je ne sais pas, vous savez, je ne vais pas là pour acheter, je ne vais pas à la monnaie tous les jours. Non, parce qu'il y a certaines médailles qu'on a du mal à trouver. Il faut bien assister. Ah, ben peut-être, oui, peut-être bien. Notamment celle de Matthieu, il faut aussi assister pour les obtenir. Ah oui. Cher Jean Dutour, comme le temps passe, je vais vous poser la question que je pose ce soir à tous les invités. Oui. Compte tenu du fait qu'on annonce au moins 691 nouveaux romans pour la rentrée, c'est-à-dire un afflux incroyable de publications de livres, je voudrais vous demander, que pensez-vous du fait qu'à la rentrée, nous battions le record dans le nombre de nouveaux livres ? Ce que je pense a été exprimé une fois pour toutes par Stendhal qui disait, le lecteur se tue à abréger ce que l'auteur s'est tué à allonger. Je crois qu'on ne peut rien dire d'autre. Et est-ce que vous pensez que cette situation aura une influence sur le métier d'éditeur et sur le métier d'écrivain ? Dans le métier d'écrivain, il n'y aura pas. Il y aura toujours des gens de talent et des gens sans talent. Ça n'a aucune importance. Ce n'est pas le nombre d'électeurs perdus, c'est le nombre de bouquins publiés qui changeraient quelque chose. Maintenant, je crois qu'un certain nombre d'éditeurs vont voir la tâche. C'est forcément. Parce que ça coûte quand même un petit peu d'argent de fabriquer un livre. Et c'est intéressant pour ce nombre d'ouvrages, d'ailleurs, de constater l'écrivain qui perd grâce à ce livre. Vous n'allez pas le chercher au milieu de 680. Il faudra qu'il vieillisse une dizaine d'années. Si dans 10 ans, il est encore là, à ce moment-là, on pourra dire peut-être que c'était peut-être pas tout à fait foutu d'avance pour celui-là. Mais vous savez, la plupart des gens, ils croient que c'est arrivé dès qu'ils ont un petit succès. C'est très, très mauvais, ça. Ce n'est jamais arrivé. Même quand on est vieux, vieux, vieux, chelou comme moi, je n'ai jamais l'impression que c'est arrivé. Je me demande combien de petits succès il y aura pour 691 romans, c'est-à-dire 691 auteurs. 5. Pardon ? 5. Ah oui, 5. Je prends le pari sur 5, moi, de petits succès, hein, pour des grands. 5 petits succès sur 690, ça me semble une bonne moyenne. Ça sera au tirage ou au grattage ? Oui. C'est un vrai concours, ça. C'est la fin du tour, je vous le... notre quart d'heure est passée. Mais oui, je n'ai pas dit bonjour aux chères madames qui sont là. Je n'ai pas dit bonjour à ma petite Dominique Paoli et à ma chère Marie Bonne. Elles sont là, toutes les deux, et elles sont heureuses de vous entendre. Je peux me permettre une familiarité, cher maître ? Oui, permettez-vous, madame. Je vous embrasse. Je vous embrasse. Oh, mais quelle joie ! Oui, mais alors moi aussi. C'est formidable. Je n'ai pas perdu ma journée, comme disait Titus. Chers gens du tour, je vous dis merci et à la semaine prochaine. À la semaine prochaine.