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shelby

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The speaker discusses their risky and extreme stunts, which they film and upload to YouTube for views and revenue. They explain the meticulous planning and preparation that goes into each stunt, as well as the adrenaline rush and satisfaction they feel when the video goes viral. They also mention the importance of keeping their ability to travel back in time a secret, as well as their complicated relationship with their dysfuntional mother. The speaker recounts a specific stunt involving crossing a bridge on their bike and feeling invincible. Le risque, c'est mon gangbang. J'ai appris à le calculer et maintenant je le gère jusqu'à un certain point. Je n'ai pas le vertige, je suis en pleine forme et je sais ce qui vous effraie. Tout le monde ne pourrait pas faire ce que je fais. Ça exige beaucoup d'entraînement, un peu de cran, un brin d'inconscience, une excellente conscience physique, un mépris des lois et un goût marqué pour l'exhibitionnisme. Je me suis fait connaître avec une série d'exploits acrobatiques, risqués et spectaculaires. J'essaie de vous couper le souffle. Je suis le petit nouveau dans l'univers de l'extrême. Prenons la casquette du sputnum électrique. Plus de 100 millions de vues sur mon compte YouTube. On n'arrive pas à un tel résultat par chance. Il n'y a pas de place pour l'improvisation. J'ai d'effectuer un repérage méticuleux. J'ai pris mes marques, pensé au meilleur plan pour poser mes caméras, visualisé mon parcours pour l'apprendre par cœur. Ensuite, que le spectacle commence. Pimenté d'un soupçon de hasard. Serait-tu foiré? J'aurais pu glisser et me briser le cou. La police aurait pu m'attraper avant l'ascension. La météo aurait pu virer au pire. Mais non. Ciel bleu, flic en retard, grimpe est contrôlé, suspense à son comble, on s'en fout. Je travaille toujours en solo parce que je veux un solitaire, mais pas uniquement. Je refuse qu'une autre personne qui m'encoure un risque pour me filmer. J'assume mes naïveries, mais je dois rester le seul à en subir les conséquences. Et puis, il y a un point non négligeable. Les milliers de visionnements me rapportent un joli montant. Mais pas tant que ça. Je ne peux pas publier une vidéo chaque semaine et je dois gagner ma vie. J'ai des frais. Il y a l'équipement, le matériel vidéo, l'ordinateur pour le montage et le son. Partager mes revenus avec quelqu'un, je n'en ai pas les moyens. Pas pour l'instant. En fait, je ne sais pas si ça va fonctionner, mais je me suis condamnée au succès. Je dois réussir ma cascade et elle doit générer des clics. L'adrénaline, je la sens aussi dans mes veines quand le compteur s'emballe pour une nouvelle vidéo. Ça me rend fier. J'ai bien travaillé. Je mérite mon salaire parce que mes femmes ont des frissons. Je sens pas la vidéo et c'est parti. Je souffle un moment, surfant sur l'effet viral, puis je réfléchis à ma prochaine folie. Mais je ne suis pas stupide non plus. Je sais très bien que je ne ferai pas tout cela sans la fonction. C'est mon assurance. Bien sûr, je ne le dis à personne quand on me pose la question. Je mens. J'explique où, quand, comment et pourquoi j'ai utilisé ma fonction. Mon histoire est prête, rodée, détaillée, toujours exactement la même. Il faut que tu y crois dur comme fer. Comme tout le monde d'aussi loin que je me souvienne, j'ai entendu parler de notre fameuse fonction parce que c'est bien le plus précieux de notre humanité. Ma mère m'a expliqué que je devrais attendre mon anniversaire de 18 ans pour pouvoir l'utiliser. Avant cela, on risquerait de la gaspiller sans s'en rendre compte. Ça semblait très simple. Il suffisait de se concentrer sur un point précis situé en haut du nez, au milieu de nos deux sourcils, l'entreuil. Certains conseillent de presser là avec le pouce pour s'assurer de ne pas manquer notre coup. Mais ce n'est pas obligatoire. Quand la fonction se déclenche, on effectue un voyage dans le temps instantané d'une minute pile. On efface les 60 secondes qui viennent de s'écouler et on repart aussitôt à zéro. Il semblerait que la fonction soit apparue après la Deuxième Guerre mondiale. Les bombes atomiques larguées sur le Japon auraient un lien avec ça. Son incroyable existence est peu à peu révélée par des hasards. Les humains l'utilisent pleinement depuis une cinquantaine d'années, mais on en apprend encore sur elle. Il y a deux points importants à retenir. On ne peut l'utiliser, on ne peut utiliser notre fonction qu'une seule fois dans notre vie et personne ne s'en souviendra de la minute gommée, sauf nous. Les autres n'en sauront jamais rien. Ils n'auront rien senti ni vu. Ils n'en garderont aucune trace. Alors, personne ne peut deviner si vous l'avez encore ou non, ni ce que vous en avez fait. Une bêtise, un truc héroïque ou un accident évité. Et moi, ma face de 16 ans et mon sourire, même si j'ai des muscles qui débordent de mon chandail, les gens ne croient quand je leur explique que je n'ai plus ma fonction depuis deux ans. J'ai pour eux un souvenir extrêmement précis de ce qui s'est passé durant ces 60 secondes. Je l'ai vécu en plus. À force de le raconter, j'ai fini par m'en persuader moi-même. Au village, quand j'étais gamin, on s'amusait tout le temps à la fonction avec Florence. On s'inventait toutes sortes de scénarios et pouf, on faisait semblant de revenir en arrière et on jouait une deuxième fois de suite la scène. Ce qui était drôle, c'est ce qu'on modifiait alors. Florence a un an plus que moi, mais on était dans la même classe à l'école. Elle m'a déjà expliqué pourquoi je ne me souviens plus de la raison. Ça n'a pas d'importance. On a toujours aimé faire toutes sortes d'activités ensemble. On est comme frères et soeurs. On se connaît par cœur. Elle est la seule à savoir que mon histoire de fonction est un mensonge, mais je suis certaine qu'elle ne le dira jamais. Florence sait que j'ai encore ma fonction. Tout comme moi, je sais qu'elle a la sienne. Le jour où elle l'utilisera, je le devinerai tout de suite. On est trop proche pour pouvoir se cacher ce genre de choses essentielles. En fait, Florence est la seule personne que je fréquente. Je suis du genre ours. Flo me traite parfois de misanthrope. Je préfère ça à mes adaptés. Pour revenir à mon fonction, j'en ai besoin pour gagner des sous. J'ai quitté l'école et je vis seule. À 16 ans, ce n'est pas toujours facile, mais c'est aussi très amusant. Je suis libre de mourir de faim ou d'une chute fatale. La vie nous joue parfois de nos étourts. Il faut essayer de les renverser en notre faveur. Ce qui m'est arrivé, je ne connais pas mon père et ma mère est dysfonctionnelle, pour dire ça gentiment. Elle ne s'est jamais beaucoup occupée de moi. Elle m'a eu très jeune et a dû se débrouiller seule, sans l'aide de sa famille. Ceci explique cela, même si ça ne justifie pas tout. Tandis que je vieillissais, le comportement de ma mère s'est aggravé. Elle est devenue plus prof que jamais, comme si elle m'en voulait d'être son fils. En fait, j'ai toujours eu l'impression d'être de trop dans son existence, de n'avoir jamais été désirée. À 15 ans, je ne me laissais plus faire. Un jour que sa barbe bassait trop, elle m'a mise à la porte. Je me suis retrouvée une chambre pas chère dans une maison au village. J'ai travaillé dans le bois pour payer mes factures. Je m'en suis sortie et j'ai eu de la chance dans mon malheur. J'ai toujours été risquetout. Sans personne pour me calmer, je ne sais pas arranger avec le temps. Pour aller couper des arbres, je passais tout le temps par un raccourci que je connaissais. Il y avait un petit pont privé qui enjambait la rivière et les propriétaires étaient rarement là. Des saisonniers qui ne venaient à leur chalet qu'un mois par année, en août, quand les bébés t'ont presque tous disparu. Je traversais à vélo avec mon sac à dos et ma scie mécanique accrochée sur le porte-bagages. Je gagnais 4 km en coupant par là. Les traverses en parachute avaient commencé à lâcher à cause de la pourriture, mais mon poids plume d'adolescent ne risquait pas de passer au travers. J'ai fait ça pendant plusieurs mois, jusqu'au matin où je suis tombée sur deux hommes qui démontaient le pont, arrachant tout le plancher pour le changer. Je les observais de loin pendant un quart d'heure. Ils travaillaient vite et c'était bizarre de voir la structure se dénuder petit à petit. J'essaie de me tourner. Je suis retournée trois jours plus tard et il ne restait plus que les deux grosses poutres vertes qui engendaient la rivière. Ça changeait complètement la vue. Avant, le tablier en vieux bois s'intégrait au paysage. Là, ces deux lignes droites métalliques dessinaient une sorte de route futuriste pour véhicules sur coussins verts. Tout le décor s'est retrouvé modifié, la lumière et la perspective aussi. Je me suis approchée pour jauger le passage. La semelle des poutres en hache mesurait 20 cm et elle était bien sèche. Ça m'a attirée. J'ai avancé bras à l'horizontale lentement. Je me suis mobilisée au milieu avec le rapide qui bouillonnait sous moi. Je me trouvais bien là et fort. J'ai rejoint la rivière opposée, puis j'ai traversé les 15 mètres plus vite cette fois-ci. J'avais envie de danser sur ces grosses poutres parallèles. Je m'y sentais presque plus à l'aise que sur la terre ferme. J'ai attrapé mon sac et ma tronçonneuse et je les ai transportées d'un bord à l'autre. Même pas peur, comme on dit. À cet instant précis, je ne savais pas encore ce que je voulais. J'agissais par instinct. Avant de revenir chercher mon vélo, j'ai installé mon téléphone pour filmer la scène, pour garder une trace de ma chute. Au pire, je tomberais dans l'eau. Ce n'était pas si profond, mais il y avait de grosses roches partout. J'ai redressé mon vélo et je l'ai soulevé. Il ne pesait pas si lourd. Je m'apprêtais à le porter quand j'espérais changer de pied. Je l'ai reposé au sol et j'ai grimpé dessus. Ma bicyclette, c'est comme un prolongement de moi. J'avais roulé des centaines de kilomètres avec, sur toutes sortes de chemins. J'ai serré les points, je me sentais serein. Rien ne pouvait m'arriver. J'ai pris une profonde respiration. J'ai tourné en rond pour m'assurer que tout fonctionnait normalement, puis je me suis lancé. Pas trop vite, ni trop lent. Non plus. Il suffisait de pédaler régulièrement en fixant la bande à bicyclette, sans trembler ni réfléchir. Facile. La traversée a duré quelques secondes. Quand j'ai rejoint la rive opposée, j'ai hurlé de joie. Je me sentais invincible. J'ai vérifié l'enregistrement. On me voyait au loin vers le vélo dans les airs. Puis, tourner et revenir vers la caméra. Une trajectoire presque parfaite. On distinguait bien la rivière. On l'entendait aussi. C'était vraiment crétin d'avoir fait ça. Je me prenais pour qui ? Un acrobate ? Un gars de cirque du soleil ? J'ai regardé la vidéo encore et encore. À un moment, on remarquait que mon tenue avait frôlé la bordure de la poutre. J'étais à un sentiment de la catastrophe. Et c'était excitant. Je ne m'étais pas filmée. Si je ne m'étais pas filmée, j'aurais perdu tous ces détails, ces sensations, cet état de transe. Et qui m'aurait cru à Port-Florence ? Moi qui ne parle à personne. Le soir, j'ai flirté sur Internet. J'ai regardé des dizaines de séquences de bingo qui effectuaient des parcours dangereux sans aucune protection. Ils grimpaient sur des grues ou en hausse des gratte-ciels. Ils dévalaient des montagnes en BMX. Ils escaladaient des tours en basket et en tee-shirt, sans casque ni harnais de sécurité, se criant de la menace. Ça donnait le frisson. Et je ne pouvais pas m'arrêter de les visionner totalement captivés. Il y avait toujours l'aspect illégal qui pimentait leurs vidéos. Ils s'entraient sur les chantiers en cachette ou trouvaient les escaliers de secours qui menaient sur les toits. Bien sûr, ils et elles étaient très jeunes. Parfois, un tuo ou un trou héroïque partait à la sensation du même pont. Les participants se filmaient entre eux. Ils risquaient clairement leur vie et se comportaient comme si de rien n'était. Sur ma séquence, je portais mes vieux souliers de protection avec des cadres d'acier, mon jus déchiré, ma chemise carottée et ma casquette orange. On voyait bien que j'agissais comme une équilibriste amateur. Tord dans la nuit, j'ai téléchargé mon petit film sur YouTube. Tel qu'elle, sans montage. Il me fallait un pseudonyme. Je n'ai pas cherché longtemps. J'ai tapé Nicolas sans peur. Ajouter un H à mon prénom, ça donnait un anglophone plus international. Le sans peur, je l'ai piqué un roi de France, Jean sans peur. En vrai, il n'était pas vraiment un roi, juste un duc, mais j'ai trouvé que son nom plutôt cool. Ça se rapprochait d'un super-héros. J'ai dormi quelques heures et je suis partie travailler à l'aube, comme d'habitude, par le trajet long. J'avais caché ma scie dans le bois et mon boss me raftaillait en essence et en huile. J'abattais des épinettes toute la journée, seul. Quand il y en avait suffisamment à taire, il venait les chercher avec son truck et il m'assignait une nouvelle parcelle. J'avais chaud et les mouches noires me harcelaient, mais personne ne m'embêtait. Un ours, je vous le dis. Cet été-là, j'ai décidé de décrocher de l'école sans trop savoir comment je gagnerais ma vie. L'hiver, j'allais devoir trouver autre chose et aussi passer mon permis, en plus de m'acheter une auto. Ça représentait beaucoup d'argent que je n'avais pas. Mais tout a basculé à mon retour à la maison. Ça fait un peu plus d'un an que ça. Quand j'ai ouvert mon PC, ça bittait et clignotait comme jamais. J'avais reçu des dizaines de messages du monde entier et le truc le plus improbable, ma vidéo avait été vue presque 10 000 fois. Elle était partagée par des Grecs, des Coréens, des Américains et des Français. Ils likaient par centaines. Les gens capotaient sur un petit traversé à vélo sur la poutre. Je n'y attendais tellement pas. J'avais quand même pas franchi le mur du saut en bobette. Ça m'a tellement pris de court parce que je n'espérais pas cet engouement, même dans mes rêves les plus fous. Mais là, en direct, je voyais mon mini-exploit se propager comme une prennée d'adrénaline. Dans les messages que je recevais, on me félicitait, on louait ma tenue vraiment originale, on cherchait à me rencontrer. J'ai grillé des saucisses sur mon barbecue en buvant du Coke. J'étais isolée dans mon petit village de la Nouvelle-Guerre. Mes amis et mes voisins ne se doutaient pas de ce qui m'arrivait. Tu aurais imaginé que Nicolas sans père et Nicolas le décrocheur ne formaient qu'une seule et même personne. Je ne pouvais pas garder ça pour moi. J'avais envie de célébrer cet événement. J'ai envoyé un texto à Florence avec un lien vers YouTube. Elle m'a appelée deux minutes plus tard. « Nico, c'est vraiment toi ? » « Ben ouais, tu ne me reconnais pas ? » « Si, mais t'es sur YouTube et il y a des milliers de gens qui me regardent. » Tu m'en as jamais parlé de ça. Je savourais l'instant. Florence connaissait tout de moi, mais je venais de réussir à la surprendre. Pour dire la vérité, je m'étonnais moi-même. « Je ne t'en ai jamais parlé parce que je ne savais pas ce que j'allais faire. » « Puis c'est quoi ce nom-là ? Nicolas sans père ? » J'ai ri et Florence aussi. Puis elle s'est dit. Elle devait lire les commentaires sous la vidéo. « T'aurais pu te faire super mal, n'est-ce que ? » C'est justement pour ça que tout le monde regarde. C'est vraiment épais. Venant de sa part, c'est un compliment. J'ai réalisé que le danger attire. Les gens ne souhaitent pas pouvoir mourir en direct, mais ce n'est pas loin de ça. Même si personne ne l'avouera jamais. « Et maintenant, c'est quoi ton plan Nicolas sans père ? » Bien, continuer. Je vais faire une autre vidéo. « Comme quoi ? » Je n'avais pas prémédité ma première cascade, encore moins la deuxième. Qu'est-ce que je pouvais accomplir pire ? « Tu vas encore aller en vélo là où tu ne dois pas ? » Je réfléchissais. Je me doutais que je ne pouvais pas grimper en haut de la tour du CN ni du pont Jacques-Cartier. Mes moyens étaient limités. Qui avait-il d'élever au plage notre église ? « Flo, ton père est toujours marié. Tu pourrais lui emprunter la clé de la sacristie ? » « T'es-tu fou ? » Sa réaction m'a confortée dans mon idée. J'allais tenter un tour sur l'église avec mon vélo ou pas. « On se voit demain pour en parler ? » Florence a soupiré. « Peut-être, mais juste pour être sûre d'un truc. » « Quoi ? Tu as toujours ta fonction, non ? » Je ne lui ai pas répondu aussitôt. L'amour revenait souvent dans les commentaires. On voulait savoir si je l'avais encore ou pas. Jouer sa vie sans risquer de la perdre, ce n'était pas extraordinaire. Quand j'ai roulé sur la poutre, je n'y avais même pas pensé, pas consciemment. Mais au fond de moi, je savais que je pouvais éviter mes trames. Ça m'aurait sûrement procuré cet aplomb. « Nico, t'es là ? Pourquoi tu ne me réponds pas ? Rassure-moi. » Florence avait le droit de connaître la vérité, mais seulement à elle. Oui, j'ai toujours ma fonction, mais il faut que ça reste entre nous. Officiellement, je ne l'ai plus. « Qu'est-ce que tu comptes dire ? » « Je vais trouver. Je te raconterai demain. » On s'est quitté là-dessus. J'allais devoir m'inventer une histoire plausible pour mon fan club. Quand j'ai raccroché, l'afficheur indiquait que j'avais reçu deux appels pendant une conversation, un de Mariam et un de Kim, sa fille. J'ai essayé à les rappeler. Je ne leur avais pas causé de pénitentité à part un « salut, bonjour » en les croisant l'épicerie. Je me doutais bien qu'ils se manifestaient en lien avec ma vidéo. Les deux devaient s'inquiéter. Elles venaient aux nouvelles, mais je n'avais pas envie de chaser de moi. Je n'avais rien à justifier ni à promettre. Un gars a bien le droit de traverser un pont en vélo. J'avais douze ans. Je m'en souviens avec naïveté. Mais Kim ne se souvient pas du jour où il a été sa fonction. C'était à Pâques, le vendredi saint. Je n'avais pas d'école et je devais garder Victor, le fils de ma voisine Valériane, qui travaillait. Il avait trois ans et je m'en occupais régulièrement. Je n'avais pas suivi mon cours de garde-à-verti, mais je savais jouer avec un kid et lui préparer à manger. Victor m'aimait beaucoup parce que j'étais un grand. En fait, il faisait tout ce que je lui demandais et ce n'était pas compliqué de le garder. Sa mère me faisait confiance. Je la dépannais souvent parce qu'elle était monoparentale. Enfin bref, ce jour-là, il faisait super beau, gros soleil, ciel bleu, pas de vent, mais c'était pas chaud pareil. C'était encore couvert de neige partout et j'ai décidé d'aller faire un tour dehors avec notre chienne qui s'appelait Malie, un Border Collie de cinq ans, très docile, joueuse, qui adorait les enfants. J'ai accroché le petit traîneau derrière elle avec le harnais que j'avais bricolé. Comme on faisait d'habitude, j'ai installé Victor dedans, bien en étoufflé et on est partis sur le chemin en arrière de chez nous. Malie avait besoin de se défiler alors tirer le gamin, ça lui faisait dépenser plein d'énergie. On a marché comme ça pendant le bout. Puis on est arrivés en bordure du lac Rémy, encore tout gelé, tout blanc, vraiment superbe. On a suivi la rive sans se presser. Malie avait trouvé sa mère d'aller. Elle trottait et Victor rigolait chaque fois qu'il y avait

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